Tendance : divorcer pour mieux se loger

27 juillet


Le ministère du territoire, des infrastructures et du transport a annoncé avoir identifié une femme âgée d'une cinquantaine d'années, qui aurait divorcé après 25 ans d'union avec son mari en novembre 2013 avant de se remarier avec son ex-mari en octobre 2014 puis de re-divorcer en décembre 2017, tout cela afin de capitaliser un certain nombre de points supplémentaires afin d'acquérir plus facilement un des nouveaux appartements en construction dans le quartier de Hanam, à Séoul. Cela peut sembler extrême, mais tous les recours sont possibles pour obtenir des points afin d'acheter un appartement en construction à Séoul, synonyme de plus-value instantanée de plusieurs (dizaine de) milliers d'euros. Pour les autorités, "c'est tout simplement un faux divorce afin d'obtenir des chances d'acquérir un logement". La femme risque 3 ans de prison ou une amende de maximum 30 millions de wons (27 000 dollars) avec en prime la perte de son appartement et une interdiction d'acheter un appartement pendant 10 ans.



Il faut dire que la concurrence est rude si le complexe d'appartements est bien évalué. Sur Hanam, 55 100 personnes ont tenté leur chance d'obtenir le Graal, soit un ratio de 26,3:1. Parmi les derniers appartements en construction, le complexe bâti par Hyundai Engineering & Construction Co. du côté de Ehwa Womans University est sur un ratio de 649:1 ! Sur Gangnam, le quartier luxueux de la capitale, les prix des appartements ont augmenté de 110,9% entre décembre 2002 et juin 2018, selon KB Kookmin Bank. Les logements en Corée du Sud, c'est pour 60% des appartements (2016), soit un total de 10.03 millions. Mais pourquoi s'endetter à acheter ou louer un appartement lorsque des maisons pas trop chères existes aux alentours de Séoul ? Deux réponses : il faut montrer qu'on a de l'argent et donc vivre à Séoul est une obligation (20% de la population vit dans la capitale, 50% si l'on inclut la périphérie), et vivre en appartement symbolise le fait d'appartenir à la classe moyenne. En effet, 52.7% de la classe moyenne et 74.6% de la classe supérieur vivent en appartement à Séoul et dans sa banlieue.



Les Coréens ont la possibilité d'acheter un appartement dès que la construction est lancée. Pour les plus malins, il suffit d'investir dans des quartiers en ruine en achetant à bas prix un logement prêt à être démoli, ce qui donnera droit à un "ticket", une sorte de réduction lors de l'achat d'un appartement qui sera construit en lieu et place de ce logement. Un investissement risqué car un quartier en ruine ne signifie pas qu'il sera démoli de sitôt. Cela peut prendre des années avant qu'une construction ne se lance. Pour les autres qui n'auront pas eu ce courage, c'est un peu le loto. Un tirage au sort est effectué en fonction des points des futurs acheteurs : jeunes mariés, divorcés, plusieurs enfants, durée du placement d'argent sur un compte logement dédié, etc. Il est donc normal de voir des cas d'usurpation pour obtenir des points. Le faux divorce en est un, tout comme les faux enregistrements d'adresses afin de faire bénéficier aux enfants d'une place dans une meilleure école, les fausses déclarations de revenus ou encore les faux mariages. Sur le cas de Hanam, 108 cas d'activités illégales ont été recensés dont 77 cas de fausses adresses et 3 cas de fausses déclarations.



Les facteurs sont nombreux et il n'est pas rare de voir des gens trafiqués leur déclaration pour obtenir plus de points. Cela ne fait pas peur vu les sommes en jeux. Par exemple, un appartement de 84 mètres carré construit par GS Engineering & Construction Co. dans le centre de Séoul a été vendu 780 millions de wons (693 000 dollars) en 2014 et en vaut aujourd'hui presque le double : 1,45 milliards de wons (1,3 million dollars). Ce n'est pas rare. Le complexe de presque 5 000 foyers situé à Ahyeon et construit en 2015 a vu sa valeur passée de 550 millions à 1,3 milliards de wons. Il faut dire que les "hot places" ont toutes les raisons d'attirer du monde ; les complexes nouvellement construits sont équipés en domotique, proposent des services de crèches, de seniors club, des salles de gym, des piscines et des bibliothèques, sont proches à la fois du centre, de la ligne de métro 2 (circulaire) et des quartiers business, et sont souvent situés à proximité d'écoles et d'instituts réputés.


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