Fleur Pellerin dans la tourmente avec Korelya

19 décembre


Fleur Pellerin fait la Une de la presse française ce matin suite à un conflit d'intérêt entre son activité au sein de sa société créée en 2016 et ses postes au numérique, au commerce extérieur puis à la culture sous les gouvernements de Manuel Valls et de Jean-Marc Ayrault. La Haute autorité pour la transparence de la vie publique, initiée en 2013 sous la présidence de François Hollande, la soupçonne de prise illégale d'intérêts dans le cadre de sa relation privilégiée avec le géant de l'Internet sud-coréen Naver. Fleur Pellerin a traité avec le premier portail de recherche de Corée lorsqu'elle était ministre, mais le groupe coréen est également le premier partenaire de sa société Korelya*.


En effet, non reconduite dans ses fonctions lors du remaniement ministériel du 11 février 2016, Fleur Pellerin, d'origine sud-coréenne (née Kim Jong-sook (김종숙) le 29 août 1973 à Séoul puis adoptée par une famille française à l'âge de six mois), avait reçu l'accord de la Haute autorité pour créer, dès l'été 2016, Korelya Capital, une société qui gère le fonds d'investissements "K-Fund I" dont le but est d'accompagner les investissements coréens en France dans le domaine des nouvelles technologies et de financer, dans la matière du possible, les start-ups françaises en leur donnant accès aux marchés asiatiques. Elle quitte aussi la haute fonction publique en arrêtant ses activités à la Cour des Comptes au mois de juillet, « par éthique » dira-t-elle.

 t-shirt coréen

Malgré toute sa bonne volonté, cela n'aura peut-être servi à rien. La Haute autorité annonce donc aujourd'hui la saisie récente du parquet national financier afin de démarrer une enquête sur le sujet. La publication ce jour-même d'un rapport spécial visant Fleur Pellerin au Journal Officiel est une démarche pour le moins inédite ; c'est ainsi la première fois qu'un ministre qui a quitté la fonction publique et s'est reconverti dans le privé tout en faisant part de son orientation professionnelle à la Haute autorité, reçoive un tel retour de bâton.


Mais qu'est-ce qui est reproché à Fleur Pellerin ? Première infraction, la Haute autorité estime que les réserves émises dès le 21 juillet 2016 au sujet de sa reconversion dans le privé n'avaient pas été prises en compte « en prenant pour client une entreprise privée avec laquelle elle avait conclu un contrat ou formulé un avis sur un contrat ». Deuxième infraction, et de taille, la Haute autorité pour la transparence de la vie publique reproche à l'ex-ministre d'avoir, après la création de sa société, conclu une relation d'affaires avec le groupe Naver Corporation, société avec laquelle elle avait déjà « tissé des liens » à l'époque où elle travaillait au gouvernement. Pour faire fonctionner le fonds "K-Fund I", Fleur Pellerin a ainsi collecté pas moins de 200 millions d'euros de la part du groupe sud-coréen Naver.

Dans le détail, il est mentionné les voyages de Fleur Pellerin en Corée du Sud en 2015, pendant lequels elle avait rencontré le président de Naver Corporation dans le cadre de la diffusion par Naver des événements de l'Année France-Corée, puis signé, au nom du gouvernement français, une lettre d'intention avec Naver Corporation concernant, notamment, l'offre d'une chaîne dédiée sur son service : Naver TV Cast, qui accueille, à ce jour encore, des contenus vidéos sur les liens culturels entre la France et la Corée.



Dans le journal officiel, il est ainsi mentionné que dans le cadre de la prise illégale d'intérêts, il faut se reporter à l'article 432-13 du code pénal : « Est puni de trois ans d'emprisonnement et d'une amende de 200 000 €, dont le montant peut être porté au double du produit tiré de l'infraction, le fait, par une personne ayant été chargée, en tant que membre du Gouvernement […] dans le cadre des fonctions qu'elle a effectivement exercées, soit d'assurer la surveillance ou le contrôle d'une entreprise privée, soit de conclure des contrats de toute nature avec une entreprise privée ou de formuler un avis sur de tels contrats, soit de proposer directement à l'autorité compétente des décisions relatives à des opérations réalisées par une entreprise privée ou de formuler un avis sur de telles décisions, de prendre ou de recevoir une participation par travail, conseil ou capitaux dans l'une de ces entreprises avant l'expiration d'un délai de trois ans suivant la cessation de ces fonctions ».

 Extrait Ginseng Coréen

Et ainsi que, d'après le Journal Officiel, "ces dispositions impliquent notamment que Mme Pellerin ne peut, respectivement jusqu'au 2 avril 2017, 25 août 2017 et 11 février 2019, exercer une activité rémunérée dans une société dont elle a assuré le contrôle ou la surveillance pendant ses fonctions ministérielles successives ou avec laquelle elle a conclu des contrats ou formulé un avis sur de tels contrats, ou à l'égard de laquelle elle a proposé à l'autorité compétente de prendre des décisions ou formulé un avis sur de telles décisions. La même interdiction vaudra pour les fonctions exercées par Mme Pellerin en tant que membre de la Cour des comptes jusqu'à l'expiration d'un délai de trois ans à compter de la date de sa radiation des cadres, soit le 15 août 2019".


Concrètement, la société Korealya ne pouvait pas jusqu'au 11 février 2019 fournir des prestations à des entreprises qui ont bénéficié d’aides financières ou de décisions de la part du ministère de la Culture et de la communication ou conclu des contrats avec ses services. En mai 2018, Fleur Pellerin signifiait que la lettre d'intention signée avec Naver ne pouvait être vue comme un contrat.

Korelya Capital rassemble une équipe de neuf personnes, établies entre la France et la Corée du Sud, dédiées à l'émergence de champions européens dans le domaine des nouvelles technologies.


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