Les Coparazzi : la délation pour mieux lutter contre le COVID-19 en Corée du Sud

25 décembre


Depuis le mois de juillet, un site web (www.safetyreport.go.kr) et son application mobile (안전신문고) sont très à la mode auprès des sud-Coréens. Lancée par le gouvernement, plus précisément par le ministère de l'Administration publique et de la Sécurité, l'interface baptisée "rapport de sûreté COVID19" permet à tous les citoyens de dénoncer au gouvernement tous les comportements qui vont à l'encontre des mesures de prévention contre le nouveau coronavirus : rassemblements en trop grande nombre, non port du masque, mauvaise aération d'un lieu polyvalent, etc. Et pour certains, cela permet de gagner une "petite" récompense à la clé ! 

Si le premier mois, seulement 1 779 cas ont été rapportés auprès des autorités, le bouche à oreille a fait exploser les compteurs de cette plateforme de dénonciateurs, plus communément appelés "Coparazzi" : 8 071 en août, 8 343 en septembre, 4 654 en octobre et 10 036 en novembre. Le chiffre relativement bas du mois d'octobre correspond à une période intermédiaire entre la deuxième (15 août au 15 septembre) et la troisième vagues (13 novembre à aujourd'hui). 


Rien que depuis le début du mois de décembre (1er au 23 décembre), le site rapporte un record de rapports avec pas moins de 15 737. Un chiffre qui pourrait plus que doubler d'ici la fin décembre, sachant que le gouvernement a renforcé les mesures de prévention contre la propagation virulente du COVID19 dans le pays, comme l'interdiction de réunions privées ou professionnelles à plus de 4 personnes sur le plan nationale. La violation de cette ordonnance d'interdiction de rassemblement peut entraîner une amende pouvant aller jusqu'à 3 millions de wons, un peu plus de 2 200 euros, pour les établissements.

Si jusqu'au mois dernier, de nombreux rapports indiquaient que les règles de prévention n'étaient pas correctement observées dans les restaurants, les installations sportives intérieures, les cafés, les installations religieuses, les transports en commun et les écoles, ces derniers temps, de nombreux rapports sont liés à divers événements et à la congestion pendant les vacances de fin d'année et du Nouvel An. 

Parmi les rapports émis, il a été rapporté que les règles de distanciation sociale et de prévention n'étaient pas correctement observées par certains citoyens, comme faire la fête dans des chambres d'hôtels ou servir de la nourriture sans masque dans les restaurants-buffets. Idem lorsque les karaokés avaient pour obligation de fermer après 21h et que certains allaient encore chanter... les rapports sont rapidement tombés pour dénoncer ces mauvais comportements. 


Mais pourquoi les sud-Coréens se dénoncent-ils entre eux ? Tout simplement parce que le gouvernement leur offre de l'argent en échange. Le ministère de l'Administration publique et de la Sécurité prévoit de sélectionner 67 "excellents Coparazzi" ce mois-ci et de leur offrir 100 000 wons, environ 75 euros, en chèque-cadeau Onnuri (à utiliser dans les marchés traditionnels).

Devant le succès de ce système, les gouvernements locaux développent aussi leurs propres plateformes, avec des cadeaux encore plus conséquents. La ville d'Incheon, qui fait partie de la région métropolitaine de Séoul avec la province de Gyeonggi et la capitale, a lancé ce système au mois de septembre, en déclarant qu'il s'agissait d'une réponse qui peut éliminer efficacement les angles morts de la propagation du virus dans la vie quotidienne. Les grandes villes que sont Daejeon et Busan sélectionneront également des Coparazzi qui font preuve d'efficacité pour leur offrir des récompenses pouvant atteindre un million de wons, soit 750 euros.


Le problème, c'est que l'ordonnance sur l'interdiction de réunion à 5 personnes ou plus n'est pas claire, que ce soit pour Séoul ou les gouvernements locaux. Quid des réunions intrafamiliales lorsque la question de l'enregistrement de la résidence est prise ou non en compte ? Et que faire pour un taxi qui prend 4 personnes à son bord et se retrouve à 5 dans un véhicule ? La confusion pousse certains à démultiplier leurs recherches de contrevenants pour profiter de cette confusion.

De nombreux internautes estiment que ces rapports ou contrôles excessifs se produisent de plus en plus fréquemment, conduisant à une atteinte à la vie privée. Du 1er juillet au 23 décembre, le site de rapports de sûreté COVID19 a enregistré un total de 48 620 rapports, sur un total de 1 822 854 rapports inscrits sur le site et 237 690 sur le mois de décembre.

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